Elections en Afrique du Sud : Une opposition sans grandes figures

19 avril 2009  |  dans International

Photo : Juliette Robert/Youpress

Photo : Juliette Robert/Youpress

Loyisa Gola n’est pas politologue. Mais il est sans doute l’une des personnes qui permettent le mieux d’appréhender les subtilités de la politique sud-africaine. Dans un one-man-show décapant, «Gola Président», il dissèque tous les soirs les travers des candidats aux élections générales du 22avril.

Heureusement pour les spectateurs qui se pressent à chacune de ses représentations au Market Theatre de Johannesburg, Loyisa Gola se contente d’épingler les trois principaux partis en lice. Pas moins de 25 candidats se présentent en effet au prochain scrutin, et la plupart sont totalement inconnus du grand public. Si l’humoriste se régale des frasques de Jacob Zuma, le candidat du parti au pouvoir, il n’épargne pas non plus les deux principaux partis d’opposition, le Congress of the people (COPE) et le Democratic Alliance (DA).

À propos du premier, Gola constate qu’il s’agit du « seul parti d’opposition qui vient de passer 15ans au pouvoir ». Le COPE est en effet issu d’une scission de l’ANC. La plupart de ses membres ont fondé ce nouveau parti en décembre dernier à la suite de la démission forcée du président Thabo Mbeki. Crédité de 10% des voix selon les derniers sondages, le COPE rassemble les déçus de l’ANC, mais aussi ceux qui souhaitent voir émerger une véritable opposition au parti de Nelson Mandela, au pouvoir depuis la fin de l’apartheid. Si le COPE réunit plusieurs grandes figures de la lutte anti-apartheid, notamment son fondateur, Mosiua Lekota, ex-ministre de la Défense et ancien prisonnier à Robben Island auprès de Nelson Mandela, il souffre du manque de popularité de son candidat. Pasteur méthodiste, Mvume Dandala n’a pas d’expérience politique et peine à exister face au charisme de Jacob Zuma.

Le Democratic Alliance (DA), lui, profite au contraire d’une dizaine d’années d’expérience. Sa candidate, Helen Zille, est maire du Cap depuis mars 2006. Politicienne aguerrie, elle est réputée pour la bonne gestion de sa ville. Mais elle souffre d’un handicap de taille: sa couleur de peau. Helen Zille est en effet blanche, un détail qui compte, même 15 ans après la fin de l’apartheid. Comme le glisse avec ironie Loyisa Gola, lui-même noir: « La dernière fois qu’on vous a laissé le pouvoir, les choses ont légèrement dérapé ! » Mais selon le politologue Adam Habib, « les Sud-Africains votent de plus en plus en fonction de leur classe sociale, et non de leur couleur de peau ». Une évolution qui profite au DA, qui devrait recueillir 15% des voix et devenir le premier parti d’opposition. L’ANC est à peu près sûr de remporter les prochaines élections. Mais pour la première fois, la marge d’avance va se réduire. Une petite révolution dans cette jeune démocratie, qui a réussi à sortir pacifiquement de 46 ans de ségrégation raciale.