« L’Europe parce qu’on n’a plus le choix »

1 octobre 2009  |  dans International

Un petit centre commercial, au coeur de la banlieue de Dublin. A l’intérieur, devant un bureau à la devanture vitrée, une cinquantaine de personnes rangées en file indienne patientent sagement. Nous sommes au «  Welfare social centre », l’équivalent des Assedic en France.

Mère et fille ouvrières dans la même usine

Dans la file d’attente interminable, des mères de familles attendent, poussette à la main, des hommes en costume patientent derrière des ouvriers à la peau tannée. Ici, le silence est de mise, à peine entend-on les directives empressées d’un employé, dépassé par l’afflux des arrivants. Dans la file, Margaret, 46 ans, le cheveu blond et de grands yeux bleus, patiente depuis une heure. Derrière elle, sa fille Lauren, 23 ans, attend aussi son tour. «Nous étions ouvrières dans la même usine. Mais il y a un mois, l’entreprise a fermé et les cent employés ont été licenciés», raconte dans un souffle cette mère de trois enfants. «La plupart de nos voisins ont également perdu leurs emplois ces derniers mois», ajoute tristement sa fille. Le nombre des dossiers à traiter est tellement important que ces Irlandais devront attendre entre six et neuf semaines pour percevoir leur allocation (le nombre de chômeurs a triplé et atteint aujourd’hui 15%).

« Plus confiance dans nos dirigeants »

« Tout cela c’est la faute du gouvernement !», intervient un homme dans la file. La cinquantaine, Mark, ancien ouvrier d’une imprimerie, est au chômage depuis trois mois. « J’ai travaillé pendant trente ans dans la même entreprise, maintenant je n’ai plus rien, je vais perdre ma maison ». Des sanglots dans la voix, Mark baisse les yeux et finit par arrêter de parler. Ce père de deux enfants votera « oui » au référendum de demain : « Je n’ai plus confiance dans nos dirigeants, il n’y a que l’Europe qui pourra nous aider à retrouver des emplois. » En juin dernier pourtant, Mark « et toute sa famille » avaient dit « non » au traité de Lisbonne. Un peu plus loin, Colm, 40 ans, garde ses distances. Même pour se rendre au Welfare social center, il a revêtu son costume d’ancien manager de la finance. «Moi aussi, j’avais voté ?non? la dernière fois, confesse-t-il dans un sourire. J’avais peur que l’Irlande perde sa souveraineté si chèrement gagnée. Aujourd’hui, j’ai d’autres priorités…». Son regard s’échappe en direction de la poussette où dort Laura, un an. Colm votera donc « oui » au traité de Lisbonne, demain. « L’Europe c’est la seule solution pour nous maintenant », conclut-il. Devant lui, Margaret acquiesce : « C’est vrai, aujourd’hui on n’a plus le choix. »