Les jeunes désabusés

22 novembre 2009  |  dans International

Photo : David Breger/Youpress

Photo : David Breger/Youpress

La Roumanie vote aujourd’hui pour le premier tour de l’élection présidentielle. Vingt ans après la chute du communisme, dans un contexte de crise politique et économique, les jeunes sont les premiers désabusés.

Malgré la campagne qui envahit les rues de Bucarest, les Roumains semblent se désintéresser des élections. Sur la centrale Piata Universitatii, les étudiants passent sans un regard devant les distributeurs de tracts et les affiches démesurées des candidats. Dans un pays qui vote peu (50% d’abstention à la présidentielle de 2004), les jeunes «ont perdu leurs illusions», comme le dit un analyste de l’institut de sondage BCS. Adriana, 22 ans, n’ira pas aux urnes. Pour cette étudiante en langues, «cela ne changera rien. La classe politique en place et ses opposants sont là depuis le communisme. Ils se sont enrichis avec les privatisations et n’ont rien fait pour la Roumanie. Je suis lassée de leurs disputes continuelles, leurs mensonges et leurs jeux».

Crise économique

Corruption, scandales politiques, clientélisme et fraudes électorales, les jeunes préfèrent en rire (jaune) en regardant l’émission à succès «in gura presei» (dans la bouche de la presse). Un show qui attaque régulièrement hommes politiques et journalistes et se conclut par cette phrase : «Nous vivons en Roumanie, et cela occupe tout notre temps.» En effet, depuis octobre dernier et la chute du gouvernement, le pays traverse une grave crise politique. Un nouvel exécutif n’a pas pu être établi. Le président Basescu (centriste) est pourtant en tête des sondages, au coude à coude en vue d’un second tour avec ses opposants politiques. S’ajoute la crise économique qui a touché de plein fouet une Roumanie en pleine croissance. L’inflation est constante, le PIB a baissé de 7,1% et le taux de chômage, qui touche particulièrement les jeunes, a doublé en un an.

« Rien n’a changé depuis vingt ans »

Dans ce contexte, et à l’heure du 20e anniversaire de la chute de Ceausescu, des discours quasi-nostalgiques résonnent même chez les plus jeunes. « Rien n’a changé depuis vingt ans, c’est même pire », commente Stefan, 21 ans, à peine né lors de la fin du communisme. « Bien entendu, il n’y avait pas de liberté, mais tout le monde trouvait du travail et le pays n’était pas endetté. Aujourd’hui, beaucoup de mes amis sont au chômage. » Le poids du passé, Catalina, 22 ans, étudiante en journalisme, le ressent. «Privés de liberté pendant trente ans, les Roumains se sont jetés dans un capitalisme effréné: partout, on nous pousse à consommer. Les gens sont devenus individualistes. » Elle milite pour Remus Cernea, 35 ans, candidat du Parti vert, crédité de peu d’intentions de vote, mais le plus présent dans les réseaux sociaux sur internet comme Twitter ou Facebook. « J’aimerais que les mentalités évoluent et que les jeunes s’engagent, se rendent compte que leur vote est important », poursuit la jeune femme, même si elle admet que « cela prendra certainement du temps. »