Présidentielle au Portugal : l’austérité comme perspective

4 février 2011  |  dans International

Fresque des Jeunesses communistes à Porto. Crédits:D.Breger/Youpress

Fresque des Jeunesses communistes à Porto. Crédits:D.Breger/Youpress

Sur fond de crise économique, les Portugais votent demain pour l’élection présidentielle. Sans réelle passion.
Reportage.

Dans les rues de Porto, les affiches de campagne sont quasi inexistantes. Dire que ces élections intéressent peu les Portugais est un euphémisme. Anibal Cavaco Silva, le président de centre droit, est favori pour une réélection au premier tour face au socialiste Manuel Alegre. Mais, dans un système où le pouvoir présidentiel est faible et surtout dans un contexte de crise économique grave, les esprits sont ailleurs. L’abstention promet d’être record.

La confiance n’est plus là

Le « Centro de Emprego » de Porto (l’équivalent de Pôle Emploi) ne désemplit pas. Ricardo, 36ans, y attend résigné. Cet ouvrier du bâtiment peine à retrouver du travail depuis la faillite de l’entreprise qui l’employait, voici trois ans. « L’année dernière, je trouvais encore des petits boulots, au noir, mais depuis un an, même plus. C’est beaucoup de sacrifices : je survis avec 300 EUR d’allocations par mois avec une femme et deux enfants ». Sa compagne, qui travaillait dans une usine de fabrication de sacs, a aussi perdu son emploi. Les anciens secteurs industriels comme le textile ou la chaussure sont parmi les plus touchés. « Je n’ai aucune confiance en nos politiciens ni en l’avenir de mon pays», lâche-t-il. Les commentateurs ne sont pas plus optimistes: malgré une politique d’austérité sans-précédent la récession est attendue cette année. Le taux de chômage, officiellement de 11 %, double chez les jeunes diplômés. Comme Maribel, 30 ans, qui après des études de design, attend depuis six mois son premier job : « Heureusement, mon fiancé gagne correctement sa vie, mais pour moi, c’est une succession de chômage et de stages sous-payés ».

La précarité est devenue la norme

Pour les jeunes qui travaillent, la précarité est devenue la norme : deux tiers de ceux qui ont un emploi, sont abonnés aux « Recibos verdes», les reçus verts, des contrats précaires qui permettent à l’employeur de les licencier à tout moment et ne donne pas droit à l’assurance chômage. Près d’un jeune diplômé portugais sur dix émigre après ses études. Dans la rua de Cadofeita, une allée commerçante du centre, les publicités des enseignes de rachat d’or ou de bijoux ont fleuri. Si ces échoppes ont toujours existé, elles marchent aujourd’hui mieux que jamais. Ce qui n’est pas le cas des commerces classiques. Manuela Silva, propriétaire d’une boutique d’accessoires de mode se désole:«La crise, je la vois tous les jours. Les gens n’achètent plus car leur pouvoir d’achat a sombré. Certains jours, je fais cinq fois moins de ventes que l’an passé. Et pourtant je ne vends que des produits à bas prix, des broches à 50 cents, des bagues à 5EUR ». Dans ce contexte, la colère pourrait à nouveau se manifester dans la rue, comme ce fut le cas, le 24 novembre dernier. Le pays avait connu la plus grande grève jamais organisée depuis plus de 20 ans.