Côte d’Ivoire : un million de déplacés

12 avril 2011  |  dans International

Le camp de transit de l'UNHCR de Toe Town - Crédit J. Robert/Youpress

Le camp de transit de l'UNHCR de Toe Town - Crédit J. Robert/Youpress

Les violences à Abidjan, en Côte d’Ivoire, ont déplacé un million de personnes selon le Haut Commissariat de l’Onu aux réfugiés. À l’ouest du pays, également touché par des combats, plus de 90.000 personnes ont fui au Liberia voisin.

La crise politique qui ensanglante la Côte d’Ivoire ne cesse de s’aggraver. Vendredi, le Haut commissariat aux réfugiés de l’Onu a annoncé que la barre du million de déplacés venait d’être franchie. À Abidjan, la capitale économique du pays, les gares routières ont été prises d’assaut ces derniers jours par des milliers d’Ivoiriens qui tentent de fuir les combats opposant les militaires fidèles à Laurent Gbagbo, le président autoproclamé de Côte d’Ivoire, aux forces pro-Ouattara, son rival reconnu par la communauté internationale. L’armée tente notamment de nettoyer à l’arme lourde le quartier d’Abobo, réputé fidèle à Alassane Ouattara. Le bilan de ces violences s’élève à plus de 450 morts depuis décembre, dont une cinquantaine au cours de la semaine dernière.

Villages déserts

Le bilan des combats est en revanche beaucoup plus flou dans l’ouest du pays. Les forces républicaines d’Alassane Ouattara ont lancé en février une offensive dans cette région limitrophe du Liberia, et proche de Yamoussoukro, la capitale politique du pays. Leur objectif : atteindre le port stratégique de San Pedro et empêcher Laurent Gbagbo de recruter des mercenaires libériens. Après avoir conquis les villes de Toulépleu la semaine dernière et Bloléquin lundi, les forces républicaines avancent désormais vers Guiglo. Dans cette zone, tous les villages seraient désormais déserts. Pour éviter les combats, la population fuit en masse vers le Liberia voisin. Selon l’Onu, plus de 90.000 Ivoiriens ont trouvé refuge dans ce petit pays pauvre, meurtri par quatorze années de guerre civile.

«J’ai marché cinq jours en brousse»

Terrorisés, les réfugiés témoignent tous de la violence des combats. « Je me suis enfui de Bloléquin dimanche soir, à trois heures du matin », raconte ainsi Eric Kpain, aujourd’hui au Liberia. « Il y avait des tirs à l’arme lourde, les rebelles tiraient dans tous les sens, l’armée a quitté la ville. Je me suis enfui de chez moi sans rien emporter, j’ai marché cinq jours en brousse avant de me réfugier dans ce village », témoigne-t-il. Chaque jour, des centaines d’Ivoiriens traversent la frontière. Ils avancent par groupe de cinq à quinze personnes le long des routes, balluchons sur la tête et enfants sur le dos. Ils espèrent rejoindre les camps de transit installés par l’Onu dans plusieurs villes libériennes.

Blessés aux pieds pendant leur fuite

Le camp de Toe Town accueille ainsi près de 2.000 personnes, dont 400 enfants. Ouvert en décembre, il manque encore d’infrastructures. Beaucoup de réfugiés dorment dehors par manque de tentes. Les sanitaires sont insuffisants et l’accès à l’eau difficile. Seule consolation pour les habitants du camp : un centre de santé, géré par l’ONG Merlin, vient tout juste d’ouvrir. Beaucoup d’enfants souffrent en effet de diarrhée et la plupart des réfugiés se sont blessés aux jambes et aux pieds pendant leur fuite dans la forêt. Afin de soulager les camps de transit et les villages libériens qui accueillent des milliers d’Ivoiriens, le Haut commissariat de l’Onu pour les réfugiés a ouvert un premier camp de réfugiés à Bahn, dans le nord du Liberia. Prévu pour accueillir 15.000 personnes, il n’en héberge pour l’instant que 2.000, car le mauvais état des routes rend très difficile le transfert des réfugiés.