Portugal : Le plan d’austérité à l’épreuve des urnes

25 juin 2011  |  dans International

Photo : David Breger/Youpress

Les Portugais se rendent aux urnes, aujourd’hui, pour des élections législatives anticipées. Au coeur de la campagne: le plan d’austérité. Reportage à Lisbonne.

La place Rossio, sorte de Châtelet-Les halles portugais, était particulièrement animée, hier : mégaphone, foule qui scandait en chœur des slogans. Mais ce n’était pas tant la perspective des législatives anticipées d’aujourd’hui qui agitait les habitants de Lisbonne, que le match de football Portugal-Norvège. Car côté politique, les esprits semblent un peu plus dépités.

Campagne au goût amer

La campagne électorale, qui s’est achevée vendredi, laisse, en effet, un goût amer. Pour beaucoup, comme Bruno, 35 ans, webdesigner mais surtout activiste de la première heure, elle signe«la perte de souveraineté du pays». En effet, au coeur des préoccupations des électeurs, la question de la situation économique du pays, et le recours à un plan d’austérité de 78 milliards d’euros imposé par le FMI et la Banque européenne, auquel tous les partis portugais, sauf l’extrême gauche, ont souscrit. «Tout est déjà joué d’avance, lâche-t-il, évoquant le programme de restriction budgétaire désormais inévitable pour les trois prochaines années afin d’éviter la banqueroute du pays. Il fallait donc proposer une autre alternative», explique le jeune homme en accrochant un panneau appelant à un référendum populaire l’après-midi même.

Pourtant, si Bruno, avec quelques dizaines de manifestants, continue d’essayer de faire entendre sa voix, il reconnaît que le démantèlement du campement spontané installé sur la place, inspiré de l’itiniative madrilène des«Indignados», a«symboliquement tué le mouvement de contestation». Mais si son homonyme Bruno, vendeur dans un magasin de liqueurs,«n’ira certainement pas voter car il n’y croit plus», Laurinho, 80 ans au compteur, précise, avec une point de fierté, qu’il n’a jamais manqué à son devoir de citoyen, depuis que le vote est permis, allusion à peine voilée à la dictature de Salazar. «Notre pays en a connu de pires. Même si le FMI intervient, on s’en remettra», affirme-t-il, confiant.

7.500 EUR par contribuable

Le plan d’austérité pourrait cependant bien signifier privatisation des services publics, baisse des aides sociales ou encore nouveau démantèlement du droit du travail. Une perspective qui inquiète Antonio et Fatima, la petite trentaine, jeune couple encore étudiant.«On espère un virage à 180 degrés du gouvernement», tombent-ils d’accord. «Ceux qui paient les factures sont toujours les petits», lâche Fatima, qui reconnaît qu’avec son travail de comptable à mi-temps en plus de ses études en ingéniérie civile, elle réussit quand même à s’en sortir. Mais la facture moyenne de 7.500EUR à payer, par contribuable, pour financer le plan de rigueur proposé par le Premier ministre socialiste sortant José Socrates, risque bien de se faire sentir dans les urnes. Les dernières estimations donnaient le PSD (Parti social démocrate, centre-droit) vainqueur, avec 36 % des suffrages, contre 30 % pour le PS.