France : Les couples mixtes en danger

15 décembre 2008  |  dans France, Société

Photo : Amélie Cano / Youpress

Photo : Amélie Cano / Youpress

A Paris, le collectif des Amoureux au ban public manifeste pour dénoncer les injustices rencontrées par les couples mixtes, victimes de la politique de lutte contre l’immigration du président Nicolas Sarkozy.
Une mariée en robe de papier, un futur époux aux moustaches dessinées au crayon : c’est une union peu commune qui s’est déroulée, samedi, dans la mairie du deuxième arrondissement de Paris.

Une parodie de mariage organisée par le collectif des Amoureux au ban public, qui regroupe plus de 2.000 couples mixtes en France, pour dénoncer les injustices dont ils sont victimes. Dans la salle, le comédien aux habits de maire s’emmêle les pinceaux face aux futurs époux franco-africain : « Approchez mes amis, que je vous condamne… euh, que je vous unisse ! ». Un lapsus humoristique qui traduit une situation bien réelle. « Nous sommes contactés presque toutes les semaines par des gens qui ont des difficultés pour se marier à cause des soupçons de mariage blanc » explique Nicolas Ferran, coordinateur national du collectif. Une conséquence de la politique de lutte contre le regroupement familial, considérée par le ministre de l’Immigration Brice Hortefeux comme une immigration « subie ». « Avant, le mariage mixte était vu comme un gage d’intégration », explique Cécile Poletti, une autre coordinatrice du collectif. « Aujourd’hui, on multiplie les obstacles à tous les niveaux pour les empêcher ».

« On oblige les gens à se marier pour avoir des papiers et ensuite on les arrête »

Mal informés sur la législation, très complexe, relative à l’immigration, certains maires refusent d’accepter les demandes de mariage si l’un des conjoints est en situation irrégulière. D’autres préfèrent saisir la justice, ce qui peut conduire à une expulsion. La loi ne les oblige pourtant pas à dénoncer les demandeurs sans-papiers, sauf en cas de doute sérieux de mariage blanc. Nicolas Ferran raconte ainsi le cas d’un couple, à Strasbourg, sur lequel la mairie avait sollicité une enquête. Avertie, la préfecture a fait expulser le futur marié, en situation irrégulière. « La justice a alors annoncé que, selon son enquête, le projet de mariage était honnête, mais il était trop tard » conclut Nicolas Ferran.

Si le Collectif des Amoureux au ban public se mobilise en priorité sur la question du mariage, c’est parce que celui-ci est systématiquement réclamé pour l’obtention d’un titre de séjour. « On oblige les gens à se marier pour avoir des papiers, on leur impose une forme de vie familiale, et quand ils s’y conforment, on les arrête » s’énerve Nicolas Ferran. Mais une fois mariés, le calvaire n’est pas encore terminé. Josée, une journaliste ivoirienne mariée à un Français, vient de le découvrir. « L’ambassade française en Côte d’Ivoire m’a encouragé à me marier pour avoir une carte de résident. Maintenant que c’est fait, l’administration m’impose d’arrêter de travailler pendant six mois pour renouveler ma carte de séjour » se désole-t-elle. « Le regroupement familial, c’est le pire », ajoute son mari, qui ironise : « si vous n’êtes pas européen, alors ne tombez pas amoureux ».