Frida Kahlo trahie par les siens

10 janvier 2007  |  dans Economie, International

Autoportrait. Photo : DR

Autoportrait. Photo : DR

Tequila, lunettes, poupées… Le commerce des produits dérivés de Frida Kahlo explose. Curieux destin posthume pour une artiste violemment opposée à la société de consommation.

« Le Che, c’est dépassé. Aujourd’hui ce ne sont plus les bérets à étoiles rouges qu’on s’arrache, mais les chemises de Frida.  José, 35 ans, vendeur dans une boutique de Oaxaca (au sud de Mexico) se tient devant un mannequin très spécial. D’un mètre cinquante environ, la grande poupée est la copie conforme de l’artiste mexicaine morte en 1954.


« Le Che, c’est dépassé. Aujourd’hui ce ne sont plus les bérets à étoiles rouges qu’on s’arrache, mais les chemises de Frida. » José, 35 ans, vendeur dans une boutique de Oaxaca (au sud de Mexico) se tient devant un mannequin très spécial. D’un mètre cinquante environ, la grande poupée est la copie conforme de l’artiste mexicaine morte en 1954. Chignon tressé, boucles d’oreille, corsage multicolore (huipil) et jupe longue, le propriétaire de la boutique l’a fait confectionner sur le modèle d’un auto-portrait… C’est sa jumelle, plaisante le jeune homme. Et la preuve que les clients peuvent sortir d’ici vêtus comme Frida de la tête aux pieds.» Il ne leur manquera plus que les barrettes, la tequila, le parfum… pour compléter leur collection. Depuis 25 ans, la publication de nombreuses biographies et l’exposition de ses œuvres ont fait de l’artiste mexicaine une véritable icône. Mais c’est à la sortie du film avec Salma Hayek en 2003 que l’on commence à parler de Fridomania. Barrettes, briquets, lunettes… remportent un succès fracassant sur le marché mexicain. Au point que les héritiers de la peintre déposent son nom et fondent la Frida Kahlo Corporation. Pourtant, l’autoportraitiste avait déshérité sa famille et fait don de son œuvre à son mari, le muraliste Diego Rivera. Peu importe, la nièce de la surréaliste, Isolda Kahlo, obtient les droits sur le nom de sa tante, mais pas pour son image, et ne perd pas de temps. En décembre 2005, elle lance au Mexique la Tequila Frida et une poupée de 50 centimètres entièrement fabriqué à la main, au pris de 250 dollars. 100 000 Frida miniatures sont exportées en Europe, aux Etats-Unis et au Canada. Un an après le lancement, les résultats de la KFC ne sont pas communiqués, mais la déferlante Frida en Europe et aux Etats-Unis est loin d’atteindre les proportions mexicaines. Au pays de la tequila, les produits à l’effigie de l’artiste continuent de s’arracher. De quoi remuer les entrailles des fidèles de Frida Kahlo, militante communiste convaincue et adversaire acharnée de la société de consommation. Reste à savoir si elle rejoindra un jour Che Guevara au panthéon des icônes mondiales dénaturées.