Filière bois : une journée avec un agent de l’ONF
23 décembre 2010 | Leila Minano dans France, Société

Débardage du bois coupé en forêt de Rambouillet. © Juliette Robert/Youpress
Neuf heures, forêt de Rambouillet. Milène, agent de l’Office National des Forêts, prend son service. Le temps de changer ses souliers de ville contre des bottes règlementaires et la jeune femme part « sur le terrain ». Son terrain à elle, c’est une forêt de 24.000 hectares à une heure de Paris. « Un domaine avec beaucoup d’enjeux, explique l’agent. Car il y a beaucoup de visiteurs, d’espèces protégées et une trentaine d’exploitations forestières ».
Les arbres s’écartent devant la petite camionnette verte de Milène. Premier arrêt sur le bord de la route : un couple d’exploitants privés ramasse des troncs d’arbres coupés pour les entasser. La responsable n’est pas contente : le travail est « mal fait ». De part et d’autre, le bois dépasse de l’amas. « Ce n’est pas très beau, les promeneurs vont le remarquer », s’inquiète la jeune femme. A Rambouillet, comme dans plusieurs forêts péri urbaines, des collectifs de riverains se sont créés pour dénoncer les coupes de bois de l’ONF. Ces associations pourraient donc se servir des écarts des exploitants pour attaquer l’Office.
Moins connu que le travail de protection du patrimoine forestier, la coupe du bois organisée par les agents de l’ONF est mal comprise par une partie de l’opinion publique. Et pourtant, l’ONF, gestionnaire d’un tiers des forêts françaises, est le premier pourvoyeur de bois du pays. A travers sa filiale « Energie Bois », cet établissement public à caractère industriel et commercial, propose à la vente chaque année 13,5 millions de mètres cubes de bois. «Un chiffre stable depuis 20 ans», affirme François Bland, directeur territorial de l’ONF Ile-de-France.
Une explosion de la demande en bois-énergie
Pas d’intensification des coupes donc, mais « une demande de bois en constante augmentation », précise le directeur. Élevé au rang « des énergies renouvelables », notamment par le Grenelle de l’Environnement, le bois « séduit de plus en plus de collectivités mais aussi les industriels de l’agroalimentaire », constate François Bland. Mais pour le responsable, cette pression croissante de la demande ne remet pas en cause la gestion durable des domaines. « Il est hors de question de couper plus que l’accroissement naturel de la forêt », jure-t-il. Pour Milène, aucun risque non plus: « nous avons un plan de gestion établi sur 25 ans. Celui-ci est défini grâce aux relevés des scientifiques et validé par les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement, nous ne pouvons pas nous en écarter ».
Vers 17 heures, beaucoup plus loin dans la forêt, la camionnette verte s’arrête de nouveau. Nous sommes dans « les réserves biologiques » de Rambouillet, un morceau de forêt « sous cloche », où nichent les espèces protégées et où les coupes sont interdites. Rares sont les promeneurs à venir dans ce coin reclus du domaine. Et pourtant, à quelques mètres à peine des agents qui mesurent les arbres et comptabilisent les insectes pour l’inventaire environnemental, des barrières ont été taguées « ONF incompétents ! ». A ce moment là, on ne peut s’empêcher de penser à la remarque de Milène prononcée un peu plus tôt: « quand même, peut-être que nous devrions expliquer davantage notre travail au public ».