Climat : que faut-il attendre de Cancun ?

23 décembre 2010  |  dans Société

Action de Greenpeace au lac Chapultepec (Mexique), représentant les inondations causées par le réchauffement climatique.  Crédits photo : © Teresa Osorio / Greenpeace

Action de Greenpeace au lac Chapultepec (Mexique), représentant les inondations causées par le réchauffement climatique. Crédits photo : © Teresa Osorio / Greenpeace

Après le fiasco du sommet de Copenhague, voici un an, conclu sans accord contraignant ni objectif chiffré sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), les espoirs de voir naître un nouveau protocole à Cancun sont minces.

Cette seizième conférence sur le climat sous l’égide des Nations unies, qui se tiendra à Cancun du 29 novembre au 10 décembre, est une étape majeure à deux ans de la fin du protocole de Kyoto. Ses signataires se sont engagés d’ici la fin 2012 à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 8% par rapport au niveau de 1990. Mais même le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a jugé «improbable» que la communauté internationale puisse s’entendre sur un nouvel accord global.

Illustration faite à la conférence de Tianjin, en octobre dernier, où les échanges ont encore été tendus entre la Chine et les Etats-Unis. Les deux plus gros pollueurs de la planète, responsables de 50% des émissions de gaz à effet de serre, ont continué à se renvoyer la balle. Washington réclamant de Pékin un contrôle de ses émissions carbone et la Chine dénonçant l’inaction des Etats-Unis et plaidant pour qu’on laisse les pays en développement poursuivre leur croissance. Une situation inquiétante pour Sébastien Blavier, responsable du pôle international de Réseau Action Climat France (qui fédère des associations comme Greenpeace, WWF ou Agir pour l’environnement): «l’administration Bush bloquait toute réforme et l’élection d’Obama a représenté un espoir, mais aujourd’hui on n’attend aucune loi sur le climat avant la fin de son mandat ». Depuis la perte de la chambre des représentants par les Démocrates lors des élections de mi-mandat, cela semble d’autant plus improbable. «La Chine investit beaucoup dans l’écologie: cela fait partie de sa stratégie de développement, mais son bras de fer avec les Etats-Unis tient à une position d’affirmation sur la scène internationale».

De fait, l’Union européenne, «bon élève» de la lutte contre le réchauffement climatique, apparaît esseulée. « Le discours européen est défaitiste, mais nous ne devrons pas aller à Cancun sans ambition », affirme Sébastien Blavier. A défaut de nouvel accord, une seconde période d’engagement des pays signataires du protocole de Kyoto est sur les tablettes. «Le temps presse car le processus pourrait prendre jusqu’à deux ans, c’est ce qu’estime le secrétariat général des Nations unies. Perdre le seul accord contraignant jamais adopté serait une catastrophe, un véritable discrédit de toutes les conférences des Nations unies».

Pour que Cancun ne prenne pas des allures de débâcle, des avancées concrètes sont attendues. La création d’un Fonds vert, promis à Copenhague par les pays développés pour aider les pays pauvres affectés par le réchauffement climatique, semble en bonne voie. Trente milliards de dollars doivent être dégagés d’ici 2012 et 100 milliards par an d’ici 2020. Les versements précoces ont commencé, mais les modes de gouvernance et de financement du fonds doivent être définis. «Nous réclamons plus de transparence dans le financement. Nous craignons que cet argent ne soit prélevé sur l’aide au développement. Des mécanismes financiers innovants sont possibles comme une taxe sur les transactions financières ou sur le transport aérien et maritime. De même ce Fonds ne devrait pas être géré comme les fonds classiques type FMI ou banque mondiale, où les bailleurs ont le pouvoir. Il faut une gouvernance équilibrée avec les pays en voie de développement», déclare Sébastien Blavier.

Le dossier de la lutte contre la déforestation (responsable de 20% des émissions de gaz à effet de serre) pourrait aussi progresser. La mise en place du programme REDD+ (Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts), qui offre des compensations financières aux pays qui font des efforts pour préserver leurs forêts devrait être discuté à Cancun. «Un objectif chiffré, comme celui demandé par l’UE d’une division par deux de la déforestation d’ici 2020, devrait également être fixé. Toutefois, Il ne faut pas voir les forêts uniquement comme un puits de carbone, il faut aussi préserver l’écosystème et les peuples autochtones.», prévient Sébastien Blavier.

La France défendra l’idée d’un Fonds mondial de reboisement et d’adaptation au changement climatique (FRAC). Proposé par un rapport du député UMP Jacques Le Guen, ce fonds pourrait être financé par de « nouvelles taxes mondiales », comme des taxes sur les huiles végétales, sur les carburants fossiles et sur les flux financiers, comme l’avait défendu Nicolas Sarkozy en septembre devant les Nations unies.