Moubarak parti, les Egyptiens veulent faire confiance à l’armée
22 février 2011 | Leila Minano dans International
Ce week-end, les Égyptiens ont ouvert doucement les yeux après la fête qui a suivi la démission d’Hosni Moubarak, vendredi soir. Place Tahrir, si la vigilance est de mise, tout le monde semble avoir confiance dans les militaires pour organiser la transition démocratique.
« L’armée c’est le peuple ! » Marwa, ingénieure de 30 ans et ancienne occupante de la Place Tahrir, n’a pas l’ombre d’un doute : « Pendant tout le mouvement, les militaires ont assuré notre sécurité, ils veulent notre bien. Les Égyptiens leur font confiance pour organiser des élections libres. »
L’assurance de la jeune femme sonne comme une litanie. Place Tahrir, tout le monde semble être convaincu par le transfert des pouvoirs aux militaires.
Vendredi soir, en même temps que la démission d’Hosni Moubarak, Omar Soleimane, le vice-président, leur a confié l’organisation de la transition démocratique. Mais à ce moment-là et les deux jours suivant l’ambiance est à la fête et la liesse populaire ne laisse pas la place à l’incertitude, ni à la mauvaise humeur.
À Midan Tahrir et partout dans le pays, les Égyptiens crient victoire et reprennent en cœur : « le peuple a obtenu la fin du régime ! ». Mais deux jours après l’éviction du Raïs, on ne peut s’empêcher de se demander, si, au final, le peuple a vraiment tourné la page de l’ère Moubarak.
Dès le lendemain, Hussein Tantaoui, ministre de la Défense et nouvel homme fort du pays, affirme qu’il maintient l’exécutif en place afin de gérer les affaires courantes. Notamment le vice-président, Omar Soleimane, personnalité proche du Raïs, honnie des insurgés. Avant toutefois de prononcer dimanche la dissolution du parlement, essentiellement composé de députés du PND, le parti d’Hosni Moubarak.
Pour les Égyptiens, s’ouvre donc une période de transition de six mois, jugée nécessaire à l’organisation des élections. Période où la constitution égyptienne sera suspendue en attendant son amendement. Après soixante ans de gouvernance militaire qui ont fait suite à la première révolution en 1952, la Grande Muette est une nouvelle fois aux manettes.
« Il est temps de rentrer chez nous »
« L’armée a dit qu’elle maintenait le gouvernement en place, s’indigne Seif, un étudiant qui a occupé la place Tahrir pendant 14 jours. Ce sont tous des voleurs et des proches de Moubarak, c’est scandaleux ! ».
Nous sommes au lendemain de la reddition d’Hosni Moubarak, des dizaines de milliers de Cairotes sont revenus Place Tahrir dans l’idée de poursuivre les célébrations.
La plupart des tentes ont été démontées et les milliers d’occupants se préparent à rentrer chez eux. Seif, lui, a décidé de réinstaller sa tente à la suite de la déclaration des militaires. « Je vais rester jusqu’à ce que l’armée donnent de véritables garanties », jure-t-il. Mais dans le flot des passants qui dansent, chantent et affichent des sourires radieux, Seif semble bien seul.
D’ailleurs, l’étudiant et quelques dizaines d’irréductibles finiront par être délogés le lendemain matin par les militaires qui souhaitent rétablir la circulation. Peine perdue, dans l’après-midi des milliers d’Egyptiens reviendront poursuivre les festivités et bloqueront de nouveau le passage des voitures.
Hesham, professeur d’université en géologie, est venue se promener encore une fois sur la place où il a passé 10 jours. « J’en profite, il y aura bientôt des voitures partout », sourit-il. Avant d’ajouter :
« Je crois qu’il est temps de rentrer chez nous et de reprendre le travail. Il faut donner une chance à l’armée. Le peuple égyptien n’est pas naïf, il ne laissera personne lui voler sa révolution. Il faut savoir être patient, les militaires ont une chance de bien faire, mais ils n’en n’auront pas deux. »
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